Foi et doute
Les médias ont
très largement exprimé la stupeur dhommes et de
femmes, croyants ou non, scandalisés par les doutes qui ont assailli
pendant toute sa vie Mère Teresa, prix Nobel de la paix. Lannonce
de la publication dune correspondance exprimant ses tourments
a fait leffet dune bombe. Le plus étonnant ne me
semble pas résider dans les doutes de Mère Teresa, mais
bien dans la surprise effarée de celles et ceux qui les découvrent.
La foi, en effet, nest pas une assurance tous risques,
un confort tranquille. Elle nest pas une évidence logique,
même intérieure. Elle ne se confond pas avec un credo dont
on signerait sincèrement, calmement et intellectuellement convaincu,
toutes les propositions. La foi nest bien souvent quun doute
repoussé, « le refus dun refus » (F. Mauriac).
Elle est un combat. La foi et le doute ne se contredisent pas fondamentalement.
La foi suppose le doute plus quelle ne sy oppose. «
Croire, cest embrasser la foi et le doute à son sujet.
» (P. Tillich) La foi dit oui en dépit de tout ce qui nous
pousse à dire non : oui au divin et à lhumain ensemble,
oui à la vie et à tout élan créateur, et
cela dans la foulée de Jésus. Lexpression «
avoir la foi » est dailleurs dangereuse ; elle laisse penser
que nous pouvons posséder et maîtriser la foi, en faire
notre affaire, comme on peut construire et élaborer des doctrines
théologiques ou un catalogue de croyances. La foi ne construit
pas dans sa tour divoire un château de certitudes indubitables.
Elle ne repose pas sur des preuves. Au contraire, elle plonge lhomme
au cur de la réalité avec ses ombres et ses lumières,
ses mises en question et ses contradictions troublantes. Croire nest
pas savoir. Tant de gens voudraient croire sans plus avoir à
croire !
Laurent
Gagnebin