Quand je dormirai du sommeil
qu’on nomme la mort,
c’est en toi que j’aurai mon repos.
Tes bras me tiendront
comme ceux des mères tiennent les enfants endormis.
Et tu veilleras.
Sur ceux que j’aime et que j’aurai laissés,
sur ceux qui me chercheront et ne me trouveront plus,
sur les champs que j’ai labourés,
tu veilleras.
Ta bonne main réparera mes fautes.
Tu feras neiger des flocons tout blancs sur les empreintes de mes pas
égarés ;
tu mettras ta paix sur les jours évanouis, passés dans
l’angoisse.
Et de ce que j’aurai été,
moi, pauvre apparence,
ignorée de moi-même et réelle en toi seul,
tu feras ce que tu voudras.
Ta volonté est mon espérance,
mon lendemain,
mon au-delà,
mon repos et ma sécurité.
Car elle est vaste comme les cieux et profonde comme les mers ;
les soleils n’en sont qu’un pâle reflet
et les plus hautes pensées des hommes n’en sont qu’une
lointaine image.
En toi je me confie. À toi je remets tout. 
Charles Wagner, Devant le témoin
invisible, 1918
Cette prière a été retrouvée, après
sa mort,
dans les papiers du pasteur Charles Wagner (1852-1918)
haut 
C’est avec une profonde tristesse
que nous avons appris la mort, le 27 novembre 2006, du pasteur Geoffroy
de Turckheim. Pasteur du Foyer de l’Âme de 1999 à
2005, il anima cette paroisse avec une belle fidélité
au protestantisme libéral. C’est avec un dynamisme remarquable
qu’il sut rajeunir cette communauté, comme en témoigne
aujourd’hui l’auditoire du culte dominical. Le pasteur Charles
Wagner, fondateur du Foyer de l’Âme en 1907, fut toute sa
vie son maître spirituel. Évangile et liberté perd
avec Geoffroy de Turckheim un ami et un collaborateur. Peu avant le
début de sa maladie, notre mensuel lui avait confié la
responsabilité de la rubrique « Retrouver » ; ce
projet, hélas, ne put jamais être concrétisé.
Vincens Hubac, son successeur au Foyer de l’Âme, a consacré,
dans notre précédente livraison, une recension au livre
intéressant, très riche et didactique, qu’il venait
de publier sur le protestantisme (Comprendre le protestantisme, Éd.
Eyrolles).
Combattant dans un esprit de large ouverture spirituelle, comme Charles
Wagner ou Wilfred Monod en leur temps, pour l’union des Églises,
Geoffroy de Turckheim fut un témoin fervent de l’œcuménisme,
regrettant parfois les divisions d’un protestantisme trop éparpillé
à son goût.
Geoffroy de Turckheim a écrit plusieurs pages du livre de Wagner
à paraître en janvier 2007 à l’occasion du
centenaire du Foyer de l’Âme : L’homme est une espérance
de Dieu (éd. Van Dieren). Constitué de textes choisis
qu’il a magnifiquement introduits, cet ouvrage comporte, entre
autres, ces lignes qu’il a rédigées et signées
quelques jours avant sa mort et intitulées précisément
« Évangile et liberté » : « Par définition,
le protestantisme libéral se veut plus particulièrement
sensible à la liberté du chrétien, concept majeur
forgé de haute lutte par Luther, dans son combat pour libérer
l’esprit de ses contemporains des contraintes doctrinales imposées
par l’autorité ecclésiale. […] La théologie
libérale entend défendre le principe de la liberté
de conscience face aux dogmes et aux doctrines qui, trop souvent dans
l’histoire de l’Église, ont figé la réflexion
théologique au risque d’étouffer la Parole de Dieu
telle qu’elle s’exprime dans l’Évangile de Jésus-Christ.
»
À son épouse, à ses parents et ses enfants, à
tous ses proches et amis, Évangile et liberté exprime
ici son ardente sympathie et un témoignage de très vive
et intense reconnaissance.