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Lhomme sans passé dAri Kaurismäki (Finlande, 2002) © Sputnik Oy/Pyramide |
Amnésique, sans nom et sans papiers, M. le héros anonyme du film finlandais dAki Kaurismäki LHomme sans passé, est sommé par une salutiste dHelsinki dessayer de se reprendre en main.
Deux séquences du film vont alors se succéder, bouleversantes et émouvantes par leur intensité et leur brièveté, servies par une économie extrême de mots, une sobriété des images et un jeu remarquable des acteurs, dirigés par la grande sensibilité du réalisateur. Elles donnent, à notre sens, la clef de ce film magnifique qui obtint à Cannes en 2002 le Prix du Jury cuménique.
Première séquence : le regard courroucé, les yeux furibonds du directeur de lANPE qui prend M. pour un simulateur et le renvoie à la rue. Contre-plan sur le visage de M., joué par le grand acteur Markku Peltola, avec son regard craintif de chien battu qui part de biais vers la porte.
Deuxième séquence : ayant traversé la rue, M. se réfugie dans un café et demande de leau chaude à boire. La patronne la lui donne après lavoir intensément regardé, silencieuse. Gros plan sur leau versée dans le bol. Observant M. à la dérobée, tout en faisant semblant dessuyer son zinc, elle le voit sortir un sachet de thé usagé dune boîte dallumettes comme en se cachant à sa vue. Respect et pudeur réciproques de ces êtres simples, dans le silence du café, rythmé par les notes haletantes dun tango finlandais, filmé en plans moyens. Appelant sa vieille cuisinière, les deux femmes se regardent, sans mot dire. Le plan suivant montre un plat sur la table, « ce sont des restes » dira-t-elle, pour ne pas blesser.
Cest une véritable Cène que ces femmes partagent avec linconnu misérable. Toute la force de la charité évangélique est exprimée en quelques plans dune profonde humanité, avec le pain et le lait. En contrepoint du rejet du pharisien.
À la question « Votre film nest-il pas lexpression de quelque chose de supérieur, pour ne pas dire de religieux ? » Aki Kaurismäki répondit « En effet, de supérieur, peut-être simplement dhumain ? »
La lampe du corps, cest lil. Si donc ton il
est sain, ton corps tout entier sera dans la lumière. (Mt 6,22)
R. Nicoladzé
LHomme sans passé (2002) de Aki Kaurismäki
DVD paru chez Arte Video, réf. 786679
web : http://pyramidefilms.fr
En faisant paraître à Venise, en 1640, un recueil de musique sacrée intitulé Selva Morale e Spirituale, Claudio Monteverdi, âgé alors de 74 ans, nous livre une sorte de testament musical, après quelque trente ans passés au service de la basilique Saint-Marc. Ces quarante et une pièces, reflet de la place charnière quoccupe Monteverdi dans lhistoire de la musique, répondent, pour certaines, aux règles de lancienne polyphonie traditionnelle, et pour dautres aux canons de la nouvelle esthétique (abandon du contrepoint, recherche dune expression plus naturelle ) qui sont à la base de la musique baroque.
Préférant replacer ces pièces dans leur contexte, Françoise Lasserre, à la tête de lensemble Akadêmia (dont elle est la fondatrice) et de certains membres de lensemble La Fenice, nous offre une lecture partielle, mais néanmoins superbe, de cette forêt, en lorganisant en deux messes et trois cycles de vêpres. Une lecture attentive, respectueuse, mais en même temps imaginative lui permet, ainsi quà ses excellents musiciens, de faire entendre toute la richesse, la variété et la subtilité de cette musique, tour à tour chatoyante et dépouillée, majestueuse et émouvante. Une mention particulière pour la basse continue, dont la réalisation variée mérite dêtre soulignée.
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Matthieu Baboulène-Fossey
Claudio Monteverdi : Selva Morale e Spirituale,
par lensemble Akadêmia sous la direction de F. Lasserre,
3 CD Zig Zag Territoires, ZZT 031101
« Le baiser de Judas » dans LÉvangile selon saint Matthieu de P. P. Pasolini (Italie, 1964 © Carlotta Films
Jésus à lécran ! Le sujet est à nouveau dactualité à loccasion de la sortie de La Passion du Christ de Mel Gibson. À cette occasion nous avons souhaité revenir en couverture sur une autre image cinématographique de Jésus, celle que Pasolini a donnée dans son Évangile selon saint Matthieu. Le titre, déjà, annonce lune des grandes différences qui réside entre ces deux visions. Là où le film de Gibson se limite au Vendredi saint, oubliant presque la joie de Pâques, celui de Pasolini nous relate, dans un style quasi documentaire, la vie de Jésus et fait ressortir la Bonne Nouvelle que son humanité représente pour nous. Le Jésus de Pasolini, qui a pourtant choqué à la sortie du film, est lhomme du Sermon sur la montagne et non cette victime sacrificielle sur laquelle Gibson se complaît. Cest par la vigueur de son message que Jésus est vainqueur : voilà ce que Pasolini offre à notre réflexion.
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Raphaël Picon
Pasolini : LÉvangile selon saint Matthieu, Disponible en DVD chez Carlotta films (Paris)
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Numéro 176 |
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