Beaucoup d’amis d’”Evangile
et Liberté nous demandent : “Qu’est-ce que vous
croyez ? Quelle est votre foi ?” “Le libéralisme
protestant” n’a pas de catalogues de croyances, de “credo”,
de catéchisme. Ce serait une “contradiction dans les
termes”…
Certains affirment “est libéral”
celui qui s’auto-proclame tel… Il suffirait de le déclarer
!
Aussi il faut s’essayer à
donner quelques affirmations claires. Il y a quelques temps, l’Union
Protestante Libérale de Genève a diffusé une
brochure s’efforçant d’exprimer dans un langage
simple les grandes orientations de notre foi chrétienne.
Nous les publierons en plusieurs parutions.
Le libéralisme protestant
• Le libéralisme protestant est un mouvement issu
du christianisme, de la Réforme du XVIe siècle et
du protestantisme auquel elle a donné lieu. Il se réclame
de l’Evangile, source de vie et de lumière.
• Le libéralisme protestant est la religion de l’essentiel.Il
est fondé sur l’Evangile. Pour lui, la foi est une expérience
vivante et personnelle de la rencontre avec cet Autre que nous nommons
Dieu.
• Le libéralisme protestant reconnaît Dieu dans
le témoignage intérieur de l’Esprit-saint, c’est-à-dire
l’action de Dieu en l’homme. Cette réalité
spirituelle surpasse en signification et en valeur toutes celles
de la vie terrestre.
• Le libéralisme protestant place Dieu et la personne
de Jésus au centre de la foi. La parole et la vie de Jésus
doivent inspirer tous les actes de la vie.
• Le libéralisme protestant est aussi une méthode
qui permet de distinguer la foi de la croyance, de découvrir
à travers la Bible l’esprit divin et le sens originel,
profond, efficace, du message évangélique.
• L’approfondissement des exigences évangéliques
et protestantes a conduit à insister sur les dimensions de
la liberté et de la foi personnelle ainsi qu’à
relativiser le poids des formules doctrinales et des institutions
ecclésiastiques. C’est là l’origine du libéralisme
protestant qui s’est affirmé surtout dès le début
du XIXe siècle et n’a cessé d’évoluer
depuis.
• Le libéralisme protestant vise à renouveler
la vie chrétienne en cherchant à discerner toujours
mieux la puissance de vie contenue dans les Ecritures. Il reste
en accord tant avec les besoins religieux des esprits réfléchis
qu’avec ceux des âmes simples et confiantes. Il voit
aussi dans le progrès des sciences et de la philosophie l’expression
d’un mouvement vers la découverte des réalités
spirituelles et des sources originelles.
• Le libéralisme protestant maintient fermement le
principe fondamental de la Réforme rejetant toute autorité
qui pourrait usurper celle de Dieu. Il veut garantir et préserver
la liberté qui, seule, donne une chance à la vérité.
• Le libéralisme protestant, enfin, estime avoir une
forme particulière de réponse à formuler parmi
celles que les Eglises se doivent de proposer aux aspirations religieuses
de nos contemporains.
On le voit, le libéralisme protestant n’est ni sectaire,
ni inféodé à aucun parti (politique ou religieux)
non plus qu’à aucun système économique.
Dieu
Le libéralisme protestant affirme l’existence de Dieu.
Esprit de Vérité, Dieu se situe au centre de notre
être, de notre vie.
Les mots sont insuffisants pour définir Dieu ; ils peuvent
même le trahir. Le libéralisme protestant reste prudent
face aux dogmes et formules de confession de foi qui, comme les
symboles, ont une valeur toute relative.
Dieu ne peut pas être monopolisé. Aucune personne,
aucune communauté religieuse, aucune Eglise chrétienne
n’a le droit de s’approprier Dieu pour elle seule. Dieu
vivant est présent partout dans l’histoire des hommes,
aujourd’hui comme hier.
La Réforme a voulu rendre à Dieu sa véritable
place dans la vie des hommes : la première ! En lui, nous
pouvons avoir pleine confiance ; nous pouvons nous fier à
lui, avoir foi en lui.Par l’Evangile, Jésus nous apprend
à l’appeler notre Père.
Le libéralisme protestant est l’héritier de
tous ceux qui ont reconnu que Dieu est à la fois infiniment
proche et infiniment lointain. Proche parce qu’il est la source
de toute pensée vraie, de toute inspiration juste, de toute
intuition saine de toute volonté sainte. Lointain parce qu’il
est insaisissable à notre intelligence.
En conséquence, le libéralisme protestant, sans
les juger sommairement, est en désaccord avec toute idéologie
de laquelle Dieu est absent : athéisme, agnosticisme absolu,
matérialisme ou autre. La philosophie, les sciences et la
culture, loin d’infirmer ses intimes convictions, peuvent concourir
à la découverte des réalités spirituelles.
Le libéralisme protestant demeure critique envers les dogmes
proclamés au cours des siècles par l’Eglise chrétienne.
Sa conception de Dieu l’oblige à mettre en question,
en particulier, le dogme de la Trinité dont la base évangélique
reste sujette à discussion.
Il rejette aussi idolâtrie, superstitions ou rites magiques
malheureusement toujours prêts à réapparaître.
En revanche, il accueille avec joie tous les signes de la présence
de l’Esprit qui se révèlent, ici ou là,
dans toutes les philosophies et toutes les religions.
La Bible
La lettre et l’esprit
Le protestantisme insiste sur l’autorité des saintes
Ecritures. Mais le libéralisme protestant constate que certaines
interprétations de la Bible aboutissent à défigurer
voire à oblitérer le message de Jésus-Christ.
Il entend donc retrouver ce message, pur et simple, comme aux jours
où il fut exprimé.
La Réforme du XVIe siècle n’était qu’un
début. En nous ramenant à la Bible, elle nous a incités
à y retrouver l’Evangile dans ce qu’il a d’essentiel.
Cette réforme doit se poursuivre.
La Bible est un recueil d’écrits composés par
des hommes inégalement inspirés et relatant des expériences
religieuses fort diverses. Elle est par excellence le véhicule
du message évangélique. Elle requiert donc, du point
de vue spirituel et historique, un examen approfondi et critique.
Le protestant libéral voit dans la méthode du libre-examen
un stimulant du protestantisme.
La Bible doit être lue dans un climat de liberté
et de recherche, non par asservissement à la lettre des textes
mais par fidélité à l’Esprit qui les a
inspirés. Loin de s’effaroucher devant son caractère
humain et face à tous les sédiments que l’histoire
a déposés dans ce livre, les théologiens libéraux
sont à l’origine de la plupart des recherches historico-critiques
qui nous permettent aujourd’hui de mieux comprendre le sens,
la portée et l’originalité du message biblique.
Le libéralisme protestant invite par conséquent
les hommes à utiliser l’intelligence que Dieu leur a
donnée afin de rechercher, avant tout et toujours, le sens
des récits contenus dans la Bible et le souffle divin qui
la traverse. Il les engage à faire sans cesse l’effort
de distinguer le pur Evangile de Jésus de ce qui a été
écrit sur Jésus.
Dégagé de sa gangue matérielle et humaine,
le message évangélique révèle alors
toute sa simplicité, sa saveur et sa puissance de vie.
Le libéralisme protestant rejette donc toute bibliolâtrie
ainsi que la notion d’inspiration littérale de la Bible
; il recherche d’autant plus l’Esprit qui vivifie qu’il
s’attache moins à la lettre, qui tue.
Jésus, le Fils du Dieu vivant
L’Évangile nous révèle la personne de
Jésus.Fils de Dieu, Jésus l’a vraiment été
par l’Esprit. C’est dans ce sens qu’il a accompli
sur terre, d’une manière absolue et parfaite, la volonté
de Dieu qu’il a appelé son Père.
Cela dit, le libéralisme protestant veut éviter
de confondre Dieu et la personne de Jésus. Il faut retrouver
Jésus derrière les théories aventureuses faites
à son sujet. Jésus apparaît d’autant plus
vivant qu’il est accueilli dans notre vie comme une inspiration
divine et une présence contraignante : Celle de Dieu.
Le libéralisme protestant souligne que la particularité
la plus essentielle du christianisme est de ne présenter
à ses fidèles ni une loi ni un code doctrinal mais
un Dieu unique et une personne : Jésus.
Il rappelle sans cesse qu’avec Dieu, la personne de Jésus
est au centre de la foi. Il invite les hommes à s’inspirer
de sa parole et de son exemple, sources inépuisables de lumière
et de puissance de vie. Toutefois, Jésus ne doit pas être
adoré pour lui-même (christolâtrie) puisqu’il
a donné sa vie pour mieux nous révéler Dieu,
seul sujet de glorification.
La personne de Jésus est révélée par
l’Evangile ; mais une étude, même rapide, du Nouveau
Testament, ne tarde pas à manifester au lecteur impartial
des divergences d’interprétation qui ont conduit à
de véritables différences dogmatiques.
Au cours des siècles, les luttes dogmatiques ont été
acharnées. Les Eglises se sont structurées et ont
éprouvé le besoin de trancher. C’est ainsi qu’elles
ont élaboré successivement de nombreux dogmes qui,
malgré la sincérité des hommes des Conciles,
ont fini par constituer un écran de plus en plus opaque entre
le message de Jésus et les hommes.
Les Réformateurs ont réagi, mais sont restés
plus ou moins prisonniers de certaines formules de leur époque
au sujet de Jésus. Avec le temps, le protestantisme a appris
à garder ses distances envers certains dogmes aussi contestables
qu’inutiles : déité ontologique du Christ, sacrifice
expiatoire de Jésus, entre autres.
Il est donc essentiel de se dégager de toute attitude ecclésiastique
ou doctrinale susceptible de prendre le pas sur l’humble attention
avec laquelle le fidèle doit lire la Bible. Une lecture lucide,
éclairée, intelligente de l’Ecriture doit nous
permettre de percevoir la pureté, l’originalité
et le souffle vivifiant du message de Jésus, parfait révélateur
de Dieu.
Église, dogmes et doctrines
Le libéralisme protestant affirme que la véritable
Eglise, invisible, est constituée par tous ceux qui s’efforcent
de pratiquer la volonté de Dieu dans l’esprit de Jésus-Christ
révélé par l’Evangile. Dieu seul les connaît.
Le libéralisme protestant n’accorde qu’une valeur
relative aux institutions ecclésiastiques.
Le libéralisme protestant estime que la Vie inspirée
par le souffle de Dieu et par l’enseignement de Jésus
déborde toutes les doctrines humaines, toutes les croyances,
toutes les formules, tous les systèmes ecclésiastiques.
Le libéralisme protestant se réclame de la tradition
protestante et de son œuvre réformatrice qui tend à
faire retrouver aux fidèles la pureté et l’efficacité
du message évangélique.
Le libéralisme protestant est convaincu que tout homme
est appelé par Dieu à vivre selon sa volonté.
Cet appel donne un sens à notre vie ; c’est notre vocation
d’hommes d’y répondre ou non.
Les diverses Eglises ne sont que des instruments parmi d’autres
et ne doivent pas devenir une fin en soi (ecclésiolâtrie).
Elles doivent se réformer en permanence afin de rester des
instruments de progrès spirituel et social. Le libéralisme
combat sans cesse pour qu’elles soient largement ouvertes.
Le libéralisme protestant juge légitime qu’il
y ait diversité de traditions et de formes cultuelles correspondant
à des mentalités et des cultures différentes.
Il est ouvert au dialogue avec tous les hommes épris de vérité
et de justice, pratiquants sincères d’autres religions.
Il est favorable à un rapprochement des fidèles dans
la diversité même des traditions. Pour lui, la diversité
des Eglises ne saurait faire obstacle à la communion, qui
est reconnaissance et respect de l’autre dans ses particularités.
Quant à l’unité chrétienne, le libéralisme
protestant pense qu’elle ne peut être que spirituelle,
non pas institutionnelle ni doctrinale. Elle doit engendrer l’action.
Grâce à la liberté de conscience qu’il
s’agit de sauvegarder, les chrétiens doivent s’unir
par-dessus les barrières ecclésiastiques et doctrinales
afin d’œuvrer au bien de l’humanité.
Le libéralisme protestant s’élève donc
contre tout abus d’autorité, qu’il soit d’ordre
ecclésiastique ou doctrinal. Il adopte une attitude très
réservée à l’égard des dogmes proclamés
par les Eglises chrétiennes. Il sait que les formules par
lesquelles la foi tente de s’exprimer ne sont que des expressions
humaines et insuffisantes du mystère de Dieu. Ces formules
empêchent souvent le chrétien de discerner clairement
le message évangélique et la volonté de Dieu.
Union Protestante Libérale de
Genève